Le 4 octobre 2016, le passage de l'ouragan Matthew sur Haïti a laissé la population en état de choc. Les départements du Grand Sud, frappés directement par l'œil de l'ouragan, se relèvent difficilement après la catastrophe, qui a causé près de 500 morts et 246 blessés, et détruit un nombre considérable d'infrastructures.
Aujourd’hui, six mois après le passage de Matthew, la phase de première urgence se termine, mais les besoins sont toujours importants : les populations ont du mal à faire face au manque de nourriture et d’eau potable, et n’ont pour beaucoup toujours pas de toit en dur sur leur tête. 1,4 million d’Haïtiens ont besoin d’aide humanitaire immédiate.
Avec 146 000 familles ayant perdu leur maison, l’accès aux abris a constitué l’une des priorités. Des bâches et des kits de réparation légers ont été distribués aux familles pour leur permettre de recouvrer rapidement un abri, au moins temporaire, ainsi que des lampes solaires aux familles vivant dans les zones les plus sinistrées pour leur permettre de s’éclairer et d’éviter les incidents liés à l’absence de lumière.
Aux lendemains du passage de l’ouragan, ACTED a concentré sa réponse de première urgence sur les besoins essentiels des populations : abris, eau et nourriture.
Dès le mois d’octobre, les équipes d’ACTED ont organisé des distributions de nourriture et d’eau potable. Chaque ration alimentaire distribuée permet à une famille de se nourrir pendant un mois. Les distributions de nourriture sont accompagnées de distributions de kits de cuisine pour permettre aux familles ayant tout perdu de pouvoir continuer à préparer les repas. Quatre moyens de faciliter l’accès à l’eau potable ont été mis en place : la réhabilitation de sources d’eau, l’installation de points de chloration, l’installation de stations de traitement de l’eau et la distribution de pastilles de purification de l’eau Aquatab. En tout ce sont plus de 9 millions de litres d’eau potable qui ont été fournies aux populations affectées.
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L’accès à l’eau, l’hygiène et l’assainissement est un axe particulièrement important de la réponse d’ACTED. Plus de 17 300 kits d’hygiène, contenant des savons, des récipients pour transporter et stocker l’eau potable et des brosses à dents ont été distribués, et un volet de promotion de l’hygiène est intégré dans la plupart des interventions menées par les équipes sur place.
Dès le lendemains de l’ouragan, les coulées de boues, les inondations, la destruction des systèmes d’eau potable, les conditions d’hygiène et sanitaires difficiles des zones touchées et la promiscuité dans laquelle les personnes déplacées se sont retrouvées ont immédiatement fait craindre une forte recrudescence de l’épidémie de choléra dans les départements du Grand Sud. Les cas de choléra recensés dans la zone ont en effet plus que doublé entre le mois de septembre et d’octobre 2016.
La qualité de l’eau est déterminante dans la lutte contre le choléra, causé par l’absorption d’eau ou d’aliments contaminés : les actions d’amélioration de l’accès à des sources d’eau potable sont donc clefs pour prévenir les flambées et la propagation du choléra. Ces actions d’accès à l’eau sont indissociables de programmes de promotion de l’hygiène et bien sûr de traitement des cas de choléra.
En complément des opérations visant à améliorer l’accès à l’eau potable et à l’hygiène, ACTED a mobilisé 20 équipes mobiles supplémentaires dans les départements du Grand Sud pour prévenir la propagation de la maladie. Les équipes mettent en place un « cordon sanitaire » autour des lieux où sont recensés des cas de choléra. Tout un protocole un déployé, qui va du référencement des cas de choléra vers les centres de traitement, la désinfection des maisons du voisinage, la sensibilisation de la communauté, avec des actions visant à expliquer aux familles comment se prémunir de la maladie, associés à des distributions de kits de prévention. 6800 maisons ont été décontaminées depuis octobre 2016. 10 unités de traitement du choléra ont également été réhabilitées en urgence dans les zones les plus à risques.
Un effort particulier est porté sur les actions de sensibilisation pour limiter les pratiques à risques des populations : cela passe par une prise de conscience au niveau des pratiques individuelles, des ménages, mais aussi au niveau communautaire, notamment par rapport à la consommation d’eau insalubre et l’intégration de l’accès à l’eau potable comme une priorité essentielle. Tous ces facteurs permettent de mieux réagir face à la maladie et donc de briser les chaînes de transmission.
Grâce aux efforts conjoints d’ACTED et des acteurs engagés dans la lutte contre le choléra, la recrudescence massive de la maladie dans le Grand Sud a pu être évitée. Néanmoins, les foyers de maladie persistent, particulièrement dans les départements du Centre, de l’Ouest et de l’Artibonite. ACTED poursuit ses efforts et multiplie les stratégies pour éradiquer la maladie. Deux systèmes d’adduction en eau potable détériorés par l’ouragan seront en outre bientôt réhabilités par nos équipes afin de garantir un accès durable à une eau saine, et ainsi éviter la contraction de maladies d’origine hydrique.
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Améliorer durablement l’accès à la santé, une priorité pour ACTED
ACTED lance actuellement des travaux de réhabilitation durable d’unités et de centres de traitement du choléra dans les localités les plus touchées qui permettront aux populations d’avoir un meilleur accès aux soins en cas de choléra.
En octobre, les destructions massives des plantations, des récoltes, des stocks de plantules et des élevages plongent une partie de la population dans une grave situation d’insécurité alimentaire. ACTED a rapidement organisé des distributions de vivres et, dès le mois de novembre, mis en place des projets de soutien aux moyens d’existence des familles, tout en poursuivant les distributions d’urgence. Depuis janvier, ACTED organise des activités d’argent contre travail notamment pour le déblaiement de zones agricoles (particulièrement les plantations de cacao, qui constitue le moyen d’existence de nombreuses familles), de routes ou d’espaces communautaires détruits ou endommagés par l’ouragan. Bénéficiant à 134 400 personnes, ces activités permettent aux populations touchées d’avoir accès à un revenu temporaire pour subvenir à leurs besoins, tout en relançant les marchés locaux et en favorisant la relance de l’agriculture.
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L’aide humanitaire d’urgence a pu soulager une partie des populations en situation d’insécurité alimentaire. Mais, six mois après l’ouragan, les besoins sont encore considérables, et, avec la fin des programmes d’urgence, la situation alimentaire risque aujourd’hui d’empirer.
L’ampleur des dégâts et des destructions causés par l’ouragan sur les plantations et les stocks, couplé au contexte de sécheresse répétée depuis plusieurs années, a entraîné une crise alimentaire et nutritionnelle en Haïti qui, sans un soutien conséquent au plus vite, risque de durer au minimum jusqu’au mois de juin 2017. Une mobilisation pour un soutien agricole durable qui tienne compte des moyens d’existences des familles est aujourd’hui essentielle pour limiter l’impact de la crise alimentaire et renforcer la résilience des populations.
Après une première phase de soutien en matière d’abris d’urgence, ACTED a commencé à distribuer des kits de réparation plus conséquents, accompagnés de formations à la réparation. Un volet en soutien monétaire a également été intégré pour permettre aux familles qui ont perdu leur maison de pouvoir trouver une solution temporaire grâce à ce soutien financier. Aujourd’hui, les équipes se concentrent sur des solutions de reconstruction en dur de 1000 maisons détruites dans les mornes, les montagnes haïtiennes.
En parallèle de ses interventions en soutien aux populations touchées par l’ouragan Matthew, ACTED travaille également à réduire les risques et les impacts des catastrophes naturelles sur le plus long terme en promouvant et diffusant des bonnes pratiques, en particulier dans les zones de bassins-versants. Les habitants de ces zones particulièrement à risques subissent les dégâts des inondations, des coulées de boue, de l’effondrement des parcelles et la perte de fertilité des sols lors des catastrophes. 400 agriculteurs vivant dans le bassin-versant d’Arcahaie seront ainsi accompagnés dans la mise en œuvre de nouvelles pratiques « climato-intelligentes » dont le but est de limiter l’impact de telles catastrophes grâce à des cultures permettant de solidifier les sols, de limiter l’érosion, de proposer des sources d’énergie alternatives au charbon de bois à l’origine de la déforestation et donc les risques liées au changement climatique, et d’améliorer la qualité des terres pour une meilleure production.
En Haïti, les femmes sont particulièrement vulnérables : elles sont moins représentées dans les emplois formels, plus souvent sans-emploi, et victimes de violences et de discriminations. L’ouragan Matthew et les dégâts qu’il a causé ont exacerbé ces vulnérabilités. Certaines femmes se sont retrouvées seules, devant assumer les besoins de leurs familles dans un contexte particulièrement difficile. Une enquête multisectorielle menée par ACTED montre que le nombre de femmes ayant subi des violences a augmenté après le passage de l’ouragan. ACTED intègre à ses projets une approche genre afin de soutenir les femmes et d’éviter les risques liés à leurs vulnérabilités. Cette approche est prise en compte non seulement dans la réponse d’urgence et de réhabilitation, comme par exemple dans la sélection des bénéficiaires, mais aussi dans la réalisation des projets de long terme, notamment le projet de réhabilitation de 20 centres de santé dédiés à la santé maternelle et infantile.
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